DISCOURS D’ANDRE VIOLA Président du groupe de Gauche de l’ADF Congrès de l'ADF à Bourges – 18 octobre 2019
DISCOURS D’ANDRE VIOLA
Président du groupe de Gauche de l’ADF
Président du groupe de Gauche de l’ADF
Congrès de l'ADF de Bourges – 18
octobre 2019.
Seul le prononcé fait foi
Madame la Ministre
et
Messieurs les Ministres
Madame la Préfète
Mesdames et messieurs les
parlementaires
Monsieur le Président de l’ADF
Monsieur le Président du Conseil
départemental du Cher
Mesdames
et messieurs les Présidentes et Présidents de conseils départementaux
Mesdames et messieurs les conseillers
départementaux
Mesdames, messieurs,
Aujourd’hui,
nous voici de nouveau réunis pour notre congrès annuel. Et pour la première
fois cette année, les expressions politiques vont conclure nos travaux.
L’année
dernière, lors de l’ouverture de notre Congrès à Rennes, je formulais notre
volonté de prendre toute notre place dans le débat sur l’avenir de nos
territoires dont nous sommes les représentants démocratiquement élus.
Cette
affirmation est toujours d’actualité, mais force est de constater que nos
espérances communes de 2018, malgré une contestation sociale sans précédent,
malgré une demande de plus en plus forte de proximité de la part de nos
concitoyens, malgré une urgence climatique incontestable et inquiétante… sont
restées lettre morte.
J’affirmais
aussi notre attachement à un bien commun ; la volonté d’agir au service de
nos concitoyens ; cette volonté est plus que présente.
Mais je
précisais aussi l’impérieuse nécessité de relations solides, fiables et
indispensables avec le gouvernement, là encore c’est à un constat d’échec
auquel nous sommes renvoyés.
J’indiquais
les questions essentielles que nous devions nous poser, je formulais des
propositions en espérant que nous serions entendus. Hélas !
Les sujets
les plus essentiels ne sont qu’à peine évoqués, AIS, MNA, solidarité, dette de
l’Etat envers nos collectivités pour les compétences qui nous sont déléguées.
Rien si ce n’est, sous le prisme d’un mécano budgétaire, une mise sous tutelle
de nos budgets, une limitation de nos moyens d’action ; Les collectivités
étant forcément, évidement je dirais, le maillon faible des dérives des
dépenses publiques.
Aujourd’hui
où en sommes-nous ?
Aujourd’hui
on nous propose de transférer de nouvelles compétences, de fusionner des
prestations ou de remanier l’insertion, souvent en contractualisant, toujours
en renvoyant les questions de gouvernance et de financements aux discussions
conclusives. Enfin, on nous propose d’être des collectivités de proximité en
faisant disparaître nos recettes directes sans autre option que d’accepter la
promesse de ce qui se résume à une dotation de l’Etat.
1) Les collectivités locales et notamment
les Départements sont la clé pour répondre à la crise sociale.
A l’issue du grand débat, le Président de la
République a eu la volonté de fixer un nouveau cap, d’apporter des réponses au malaise social et au déficit
démocratique qu’un mouvement social sans précédent a mis en évidence de manière
criante.
On peut se féliciter des propos sur les élus
locaux qui sont enfin légitimités, après avoir été si longtemps méprisés.
Mais, si la confiance s’exprime par des mots,
elle ne se décrète pas, elle se construit.
Je suis en effet
convaincu que de nombreuses réponses aux revendications des Français se
trouvent au sein des collectivités territoriales.
Les dernières
tentatives de réforme de la décentralisation se sont attachées à penser de
grands ensembles, dans une logique de rivalité entre les territoires. Je crois,
au contraire, à leur interdépendance et à leur complémentarité. La
pluralité des territoires rend leur coopération indispensable. Il s’agit là
d’un enjeu de cohérence et d’efficacité de l’action publique locale.
Les questions qui
nous sont posées sont simples : Qu’avons-nous encore à proposer comme
projet collectif qui nous rassemble ?
Sommes-nous
capables, ensemble, de faire face aux défis qui sont devant nous ?
Au fond, ce sont
ces mêmes questions que sont venus nous poser les jeunes mobilisés pour le
climat. Ils expriment eux aussi une colère face à ce qu’ils considèrent comme
des renoncements. Ils nous disent eux aussi l’urgence d’agir.
L’urgence
climatique bien sûr, l’urgence sociale, mais aussi l’urgence démocratique. Ces
trois urgences sont indissociables.
Nous n’apporterons
pas de réponse à la hauteur des enjeux si nous ne traitons pas les trois en
même temps. On ne peut pas relever ces trois défis en opposant le peuple et les
élites, les villes et les campagnes, les métropoles et les communes rurales,
les français et ceux qui ne le sont pas, ou qui le seraient moins.
Les collectivités territoriales demeurent les premiers remparts face à la crise sociale que connaît notre pays. Il est temps, pour l’Etat, de leur faire pleinement confiance, notamment aux Départements, qui agissent pour tous les Français sur l’ensemble des territoires qui composent notre pays et qui disposent de leviers d’action pour construire une société plus juste.
2) Les collectivités locales et en premier
lieu les Départements ne sont pas et ne doivent pas être la variable
d’ajustement des propres politiques de l’Etat.
La vraie marque de confiance de l’Etat envers les territoires est de les renforcer et d’accentuer les complémentarités avec un Etat, irremplaçable dans ses compétences régaliennes, mais qui doit laisser aux collectivités et aux élus locaux de proximité des moyens pour leur action, afin de bâtir des politiques publiques responsables et innovantes.
Pour votre Gouvernement, les collectivités locales et particulièrement
les Départements deviennent une variable d’ajustement de vos politiques. Des
transferts de compétences ont été accordés et d’autres pourraient l’être, mais
ils ne s’inscrivent pas dans un schéma d’ensemble ; par ailleurs, vous
continuez de contrôler étroitement les recettes de nos collectivités.
Madame la ministre, (Monsieur le ministre), vous pouvez reconnaitre que
dans ce que constatent les associations d’élus, il y a une part de vérité.
On
nous annonce une loi dite « 3D » (décentralisation, différenciation,
déconcentration).
La différenciation,
c’est un mot. Et ce n’est pas le droit qui crée le réel.
Pour s’engager dans la différenciation, il faut accepter une part de prise de
risque et d’imagination. Il n’y aura pas une solution unique qui s’impose à
tout le monde. Chacun des territoires considérés devra trouver le chemin de
cette différenciation.
Ce que j’attends de cette différenciation,
c’est qu’on ouvre cette possibilité en laissant les acteurs locaux libres de
s’y engager, libres d'adapter, de
préciser, d'approfondir le cadre général fourni par les représentants de la
nation.
Si telle n’est pas leur volonté, le droit
commun continuera de prévaloir.
L’enjeu dans les textes législatifs à venir, est d’autoriser une différenciation qui puisse être accessible à tous, tout en garantissant l’unité de l’Etat.
Cela suppose que la
différenciation ne soit pas synonyme de compétition entre les territoires.
C'est ici le rôle
de l'expérimentation locale, qui vise à tester des solutions nouvelles pour,
quand elles font leur preuve, les essaimer dans les autres territoires dans une
logique de coopération.
Cela suppose aussi un Etat garant et stratège. Le problème, c’est que l’Etat
décentralise mais n’a jamais revu les missions qui pouvaient être les siennes.
Il doit clairement définir ses missions, qui
ne sont pas nécessairement seulement les missions régaliennes.
Une fois ces missions précisées, tout le
reste, potentiellement, relève des collectivités territoriales, dont des
missions incontournables, telles que la santé, le logement, les mobilités, la
transition énergétique, pour lesquelles doit être mise en place une péréquation
et dont l’Etat doit être le garant.
Pour autant, il ne suffit pas de dénoncer une éventuelle
recentralisation. La question, c’est d’assumer une envie, celle de proposer
quelque chose.
Et L’ADF y travaille et à fait des propositions
et le Groupe de gauche y travaille aussi et formule ses propositions que ce
soit en matière d’éducation, de solidarités ou encore d’aménagement et de
développement des territoires.
Je l’ai déjà dit à de nombreuses reprises et je le
redis. Je veux rappeler au Gouvernement, que derrière ce qu’il appelle, très
justement d’ailleurs, «la cohésion des territoires », se cache autre chose
qu’une enveloppe budgétaire à raboter.
Il se cache autre chose qu’une vision purement
contractuelle et en définitive purement arithmétique de nos actions.
Il se cache aussi autre chose que la volonté de diviser
les strates de collectivités et de reconcentrer les décisions.
3) L’arithmétique justement ;
Venons-en au sujet qui nous anime depuis plusieurs semaines : la taxe
foncière.
Variable
d’ajustement, dommage collatéral, impasse d’une promesse électorale ou au
contraire approche des élections municipales mais certainement et plus prosaïquement volonté délibérée de nous
asphyxier, la réforme de la fiscalité locale nous laisse un sentiment plus
qu’amer.
Car oui
les Départements sont les victimes d’une décision qui ne les concerne pas.
Aucune logique fiscale n’en découle. Si la réponse est qu’il faut doter les
Communes d’un levier fiscal, alors pourquoi ne pas avoir cette réponse pour les
Départements également ? Ou au contraire pourquoi rentrer dans une logique
de vases faussement communicants avec des airs de jeu de bonneteau ?
Les Présidentes et Présidents du Groupe de gauche, mais je pense ne pas
trop m’avancer et me tromper en y associant l’ensemble de mes collègues, nous
nous opposons à la perte de notre seul levier fiscal.
Madame la ministre, je vous le dis : Il s’agit d’une mauvaise décision. Ce débat autour de la suppression
de la taxe d’habitation concerne l’État et le bloc communal, et non les
Départements.
Premièrement, remettons un peu de sens à vos propos et arrêtons d’évacuer
la question du financement des compétences que nous exerçons pour le compte de
l’Etat.
Le Groupe de gauche a toujours distingué la péréquation verticale, de
l’Etat vers les collectivités, de la péréquation horizontale, qui est une
solidarité entre collectivités.
Nous avons fait notre part du travail ! Vous n’avez pas fait le
vôtre !
La péréquation verticale doit absolument régler les questions de
dépenses de solidarité !
Nous revendiquons toujours une compensation additionnelle pour une
péréquation verticale concernant les AIS et les MNA, piste qui semble
aujourd’hui totalement abandonnée par le Gouvernement.
Deuxièmement,
et je vous le dis, nous ne dérogerons pas sur plusieurs principes et
revendications indispensables.
Nous ne
dérogerons pas sur le principe de responsabilité qui est le vôtre !
Nous ne porterons pas le
chapeau d’un échec dû à l’absence de discussion et de concertation de la part
du gouvernement. Nous n’avons pas créé le problème !
Nous ne dérogerons pas non
plus sur le principe d’autonomie !
Il faut une compensation à
la mesure de ce qui est projetée, préservant notre autonomie et non une
solution par une dotation plus ou moins figée, et dans tous les cas
certainement très aléatoire, sans aucun pouvoir de taux.
Nous ne sommes pas dupes,
les quinze milliards annoncés ne sont que l’évolution logique et classique du
foncier bâti en 2020, ce n’est pas une fleur que vous faites aux Départements.
Quant aux 250 millions
d’euros annoncés nous ne les considérons pas comme un abondement de la part de
l’Etat au contraire même. D’une part ils seront appuyés sur une part de TVA et
d’autre part ils se substituent aux 115 millions d’euros des actuels fonds de
soutien déjà bien légers. C’est au mieux 135 millions d’euros qui s’ajoutent
tout en actant la baisse de la péréquation directe de l’Etat vers les
Départements.
Nous resterons vigilants sur les modalités de
mise en œuvre de cette réforme fiscale :
Ce n’est pas par ce que l’on ne percevra plus le
foncier bâti qu’il aura disparu. L’Etat continuera d’avoir, d’année en année,
l’évolution des bases, leur dynamique, leur localisation. Vous auriez au moins
pu nous apporter une garantie sur cette dynamique.
Mes chers collègues, Madame la ministre, Nous sommes donc en attente de la
volonté politique du Gouvernement d’ouvrir ou non cette porte de l’autonomie et
de la soutenabilité financière des Départements, sans lesquelles toutes les
annonces, que ce soit d’un nouvel élan de la décentralisation ou de politiques
publiques nouvelles, n’auront aucun sens.
Nous attendons du Gouvernement qu’il fasse des
propositions, rapides, honnêtes et concrètes !
En ce qui nous concerne, nous, groupe de Gauche, sachez en tout ca
Que nous n’accepterons pas une réforme de la fiscalité locale qui ne
nous laissera pas un pouvoir de taux et qui ne sera pas indexée.
Que nous n’abdiquerons pas sur notre revendication de la prise en charge
financière de la solidarité nationale par l’Etat.
Que nous rejetons le pacte de Cahors qui est arrivé au bout de
l’absurdité quand, dans le même temps, l’Etat nous incite à contractualiser et
à dépenser plus tout en incluant ces nouvelles dépenses dans la limite des
1.2%.
Je vous remercie.