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« Le revenu de base, tremplin vers l’insertion sociale et professionnelle, et vecteur d’intégration citoyenne » LE MONDE | 11.09.2018

« Le revenu de base, tremplin vers l’insertion sociale et professionnelle, et vecteur d’intégration citoyenne »

Dix-neuf présidents de département demandent, dans une tribune au « Monde », au gouvernement d’inclure dans le plan pauvreté un projet de loi d’expérimentation du revenu de base.
  
Tribune. La solidarité est une idée porteuse d’innovation et de justice. Il n’est pas digne de notre pays, parmi les plus riches de la planète, de tolérer que près de neuf millions de ses habitants vivent sous le seuil de pauvreté.
De nombreux travailleurs ne parviennent pas à tirer un revenu décent de leur activité
Contre la pauvreté, nous n’avons pas encore tout essayé. Refusant tout fatalisme, plusieurs départements, en première ligne sur la question sociale, ont travaillé depuis près d’un an, avec la Fondation Jean-Jaurès, à un projet d’expérimentation d’un revenu de base sous condition de ressources afin d’inventer de nouvelles protections face aux mutations du travail et de la société.
Le revenu de base est un revenu de solidarité. Si notre protection sociale est efficace dans la crise économique que nous traversons, sa performance pourrait être nettement améliorée en réparant deux injustices majeures : automatiser les prestations sociales afin d’intégrer les ayants droit qui n’y recourent pas (environ 35 % pour le seul RSA) ; et les ouvrir aux jeunes de moins de 25 ans (pour l’essentiel exclus du RSA, alors que 25 % des 18-24 ans sont sous le seuil de pauvreté).
Le revenu de base est aussi un revenu de développement. De nombreux travailleurs ne parviennent pas à tirer un revenu décent de leur activité : agriculteurs, artisans, employés et ouvriers à bas revenus, salariés à temps partiel… Le dispositif apporte un complément de ressources pour améliorer leur pouvoir d’achat et revitaliser les territoires délaissés.

Vecteur d’intégration sociale

Le revenu de base est enfin un revenu d’autonomie. Son inconditionnalité permet de développer le pouvoir d’agir des personnes, de soutenir leurs projets de vie et professionnels, leurs parcours d’insertion et les activités d’utilité sociale (aidants de personnes handicapées ou âgées, reconversions professionnelles, formations longues, bénévolats, créateurs d’activité…).
prévenir la spirale des exclusions favorise l’émancipation et donne à chacun une chance de rebondir
Le revenu de base n’est donc pas le fossoyeur de la « valeur travail ». Il constitue un tremplin vers l’insertion sociale et professionnelle, et même un vecteur d’intégration citoyenne. Il permet d’accompagner, dans le mouvement d’un monde en mutation, les parcours de travail et de vie qui sont aujourd’hui bien moins linéaires qu’autrefois. Il prévient la spirale des exclusions, favorise l’émancipation et donne à chacun une chance de rebondir.
Nous proposons de tester le revenu de base sur le terrain, d’observer les changements provoqués, d’éprouver son efficacité. Nous avons pour cela écrit une lettre au premier ministre en juin, restée sans réponse.
Cette proposition, nous entendons la porter jusqu’à son terme. Hier treize départements, aujourd’hui dix-neuf, et demain davantage encore, nous attendons du gouvernement qu’il ouvre le dialogue, réponde à nos sollicitations et intègre à son prochain plan pauvreté un projet de loi d’expérimentation du revenu de base, accompagné de la création d’un fonds national dédié.
C’est en faisant le pari de l’innovation que nous reprendrons le chemin du progrès social.

Cette tribune est cosignée par dix-neuf présidents de département : Denis Bouad (Gard) ; Pierre Camani (Lot-et-Garonne) ; Jean-Luc Chenut (Ille-et-Vilaine) ; Xavier Fortinon (Landes) ; Jean-Luc Gleyze (Gironde) ; Philippe Grosvalet (Loire-Atlantique) ; Mathieu Klein (Meurthe-et-Moselle) ; Alain Lassus (Nièvre) ; Philippe Martin (Gers) ; René Massette (Alpes-de-Haute-Provence) ; Georges Méric (Haute-Garonne) ; Kléber Mesquida (Hérault) ; Henri Nayrou (Ariège) ; Germinal Peiro (Dordogne) ; Serge Rigal (Lot) ; Nathalie Sarrabezolles (Finistère) ; Stéphane Troussel (Seine-Saint-Denis) ; Laurent Ughetto (Ardèche) ; André Viola (Aude).